Bernard Ourghanlian, directeur technique et sécurité de Microsoft France, est le préposé à la dernière journée des tech.days qui porte sur la prospective. Comme une machine bien rôdée, il a l'habitude de démarrer par une phrase ou un angle particulier, le 6ème continent l'année dernière à propos du big data ou citant et réhabilitant Alan Turing en 2012 pour parler du futur de l'informatique. En 2014, le dirigeant s'est voulu plus poétique en paraphrasant Lamartine, « objets connectés avez-vous donc une âme ? ». S'il n'apporte pas de réponse immédiate, le phénomène de l'Internet des objets est dans toutes les têtes. Le directeur technique explique que cette médiatisation est l'aboutissement de 4 facteurs qui arrivent à maturité et qui convergent, « la puissance des capteurs, le cloud pour le stockage, le mobile et le big data ».

Et cet Internet des choses touche beaucoup de secteur comme a pu le démontrer Microsoft. En premier lieu, pour qu'un objet soit connecté, il faut le doter de capteurs et plus généralement d'éléments hardware. Microsoft Research a travaillé sur un canevas matériel que l'on peut placer sur n'importe quel objet. Pour la démonstration, l'appareil a été placé sur une table. « L'objectif est de la rendre tactile pour un prix d'une dizaine d'euros et on peut imaginer utiliser la table comme une télécommande par exemple », souligne Bernard Ourghanlian. Une autre présentation a montré une fenêtre connectée qui affiche des éléments météorologiques, peut se transformer en écran TV, piloter le chauffage pour réduire la consommation énergétique, etc.

Création d'une plateforme matérielle pour connecter des objets

Les laboratoires de Microsoft ont travaillé sur une plate-forme matérielle pour connecter les objets.

De multiple scénarios

D'autres scénarios ont été démontrés dans le jardinage de balcon avec le dernier gadget sans fil de Parrot, la sonde Flower Power, qui permet d'obtenir des informations sur les besoins des plantes. L'idée peut faire sourire, mais il y a derrière un véritable travail de construction d'une base de données sur les plantes et les soins à leur apporter, de dialogue entre les capteurs et l'application. Le bien-être et le sport sont également en phase de croissance forte et Oxylane, une filiale de Decathlon, l'a bien compris en proposant une gamme d'objets connectés qui vont de l'assistant de course en passant par les écouteurs pour la natation et la caméra pour filmer ses exploits et les partager.

L'automobile est aussi un secteur en pleine évolution et devient de plus en plus connecté. Sur scène, Autolib a montré l'interaction entre les voitures et le cloud pour personnaliser l'expérience d'autopartage. Car les objets connectés doivent servir à améliorer le quotidien des gens « pas à le changer radicalement », s'exclame Rafi Haladjian, papa du lapin Nabaztag et aujourd'hui fondateur de Sense. Pour lui, la problématique de l'Internet des choses ne réside pas dans l'objet « qui connecte un oeuf, connecte un boeuf ! », scande-t-il. « Il faut penser aux usages ». Par ailleurs, il botte en touche sur les questions de sécurité et de vie privée en arguant qu'au contraire les objets connectés délivrent aux utilisateurs des informations auxquelles elles n'avaient pas accès auparavant.

Un monde en construction et à sécuriser


Un avis que ne partage pas Edouard Jeanson, responsable de l'offre sécurité chez Sogeti, qui estime qu'il y a des interrogations sur les questions de sécurité. « Avec l'Internet des objets, vous avez deux mondes qui se parlent, industrie et informatique. Il faut déjà trouver des éléments de langage commun ». Il ajoute, « aujourd'hui, l'IP devient le lien entre ces deux mondes  et cela pose des questions de sécurité particulière ». Les attaques peuvent porter sur le produit, sur la chaîne de production ou sur le système de gestion du produit. « Or, l'ensemble de la chaîne est connecté et donc à risque », souligne le responsable. Sogeti va donc élaborer une offre d'audit pour les industriels sur l'Internet des objets pour connaître les risques et les réponses à apporter.

Les acteurs du cloud commencent aussi à être interpellés sur cette problématique. Ainsi, Eric Sansonny directeur général d'Aruba France, a évoqué un client dans la distribution « qui a raccordé ses douchettes code-barre pour le scan des produits à un cloud et supprimé les caisses de paiements». L'Internet des objets se construit patiemment et si on ne sait pas si les objets ont une âme, ils ont un potentiel économique important. Cisco estime en effet que le marché montera à 14 000 milliards de dollars en 2020.