Mardi, trois jours après l’arrestation à l'aéroport de Los Angeles du professeur Hao Zhang de l'Université de Tianjin qui arrivait de Chine, le département américain de la Justice (DOJ) a établi un acte d’accusation en 32 points contre six résidents chinois, dont cinq sont toujours en fuite. Selon le communiqué de presse du département de la Justice, ces six résidents sont accusés d'avoir volé une technologie FBAR de « résonateur d'onde acoustique de volume de film fin » qui permet de filtrer les signaux et d’augmenter leur performance dans les téléphones mobiles, une technologie mise au point par deux entreprises américaines.

Plus précisément, grâce à cette technologie FBAR de filtrage des signaux sans fil entrant et sortant, le téléphone mobile ne reçoit et ne transmet que les communications destinées à l'utilisateur concerné. En plus de ces applications grand public, la technologie FBAR est utilisée dans plusieurs technologies militaires et de communications. Selon le communiqué publié par le procureur général adjoint John Carlin, les accusés ont cherché à accéder à des technologies sensibles et à partager ces secrets commerciaux avec le gouvernement chinois pour « en tirer un profit économique ». Ajoutant que « l'espionnage économique coûte très cher aux entreprises américaines, il affaiblit le marché mondial et finalement, il nuit aux intérêts américains dans le monde entier ».

Des ingénieurs bien installées aux Etats-Unis 

Selon cet acte d'accusation, le professeur Hao Zhang et l’accusé du nom de Wei Pang se sont rencontrés à l'Université de Californie du Sud (USC) au cours de leurs études de doctorat en génie électrique au début des années 2000. Pendant leur séjour à l’USC, Hao Zhang et Wei Pang ont fait des recherches sur la technologie FBAR, recherches financées par la Defense Advanced Research Projects Agency (DARPA). En 2005, avec leur doctorat en poche, Wei Pang a commencé à travailler comme ingénieur FBAR chez Avago Technologies, une entreprise basée dans le Colorado, et Hao Zhang a trouvé un poste d'ingénieur FBAR chez Skyworks Solutions, une entreprise basée dans le Massachusetts. À l'époque, ces entreprises travaillaient toutes deux dans la conception de technologies FBAR.

« Entre 2006 et 2007, Wei Pang, Hao Zhang et d'autres « conspirateurs » ont défini leur projet commercial et ont commencé à solliciter des universités et des entreprises chinoises en vue de produire la technologie FBAR en Chine », précise encore le département de la Justice. En 2008, des responsables de l'Université de Tianjin se sont rendus à San José, Californie, pour rencontrer les six accusés. Plus tard, ces mêmes responsables ont accepté d'aider Wei Pang, Hao Zhang et d'autres « conspirateurs » à mettre sur pied un joint-venture en vue de développer la technologie FBAR en Chine. Selon le département de la Justice, « Wei Pang et Hao Zhang ont continué à travailler pour les deux entreprises américaines tout en coordonnant leur projet avec l'Université de Tianjin ». Mi-2009, Wei Pang et Hao Zhang ont démissionné de leurs entreprises américaines et ont accepté des postes de professeurs titulaires à l'Université de Tianjin. Un peu plus tard, l’Université de Tianjin a créé avec Wei Pang, Hao Zhang et d'autres personnes le joint-venture ROFS Microsystem pour développer la technologie FBAR.

15 ans de prison encourus 

Le département de la Justice soupçonne Wei Pang, Hao Zhang et d'autres personnes d’avoir volé les protocoles de fabrication, le code source, les spécifications, les présentations, les plans de conception et d'autres documents confidentiels, qui sont la propriété exclusive des entreprises victimes de la violation, et d’avoir partagé cette information entre eux et avec l'Université de Tianjin. Le vol de ces secrets commerciaux a permis à l'Université de Tianjin de construire et d’équiper un centre de fabrication FBAR ultra-moderne et d'obtenir des contrats pour livrer des technologies FBAR à des entités commerciales et militaires.

La peine maximale pour complot en vue de commettre un acte d’espionnage économique est de 15 ans de prison. La peine est assortie d’une amende de 500 000 dollars ou deux fois le montant des pertes subies par les entreprises lésées. Les peines maximales pour complicité d’espionnage économique sont identiques. La peine maximale pour complot ou vol de secrets commerciaux est de 10 ans de prison. Elle est assortie d’une amende de 250 000 dollars ou deux fois le montant des pertes subies par les entreprises lésées. Les avocats des accusés et des représentants de l'Université de Tianjin n’étaient pas immédiatement joignables pour commentaire.